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Alter Ego

La caissière et son plein d'essence

Dans un bel article, le journal Le Monde nous fait partager le quotidien d'une caissière. Le reportage est impressionnant de vérité, entre la description du planning, des conditions de travail et du salaire misérable. Les internautes ne s'y sont pas trompés, puisqu'ils en ont fait l'article le plus envoyé de ces derniers jours. Mais une phrase a retenu mon attention : "Pour ces trente heures de travail éparpillées au fil de la semaine, Odile Jaloux touche un salaire de 825 euros par mois. Mais elle habite à 25 km des quartiers nord, ce qui l'oblige à dépenser 200 euros d'essence. A la fin du mois, il lui reste 625 euros (...)". Ni une ni deux, je lance mon tableur (qui n'est pas celui auquel on pense immédiatement !), et je fais le calcul. Prenons une voiture "citadine" comme on dit, et comptons une moyenne de 7 litres pour 100km. 1 aller-retour fait 50km, donc 3.5 litres. En comptant 1.34 euros le litre d'essence, cela donne 4.70 euros de dépensé. Multiplions par le nombre de journées de travail dans le mois (évalué à 24, soit 21 jours de semaine plus les 3 samedis par mois comme indiqué dans l'article) et nous arrivons à ... 112 euros et 80 centimes. Pourquoi n'ai-je pas retrouvé les 200 euros de l'article ? Première hypothèse, la voiture n'est pas une citadine. Mais pour dépenser dans les conditions décrites 200 euros d'essence, il faut une consommation presque double. Je n'imagine pas la caissière à temps partiel roulant en 4x4. Cela écornerait l'image véhiculée tout au long du reportage... Seconde hypothèse, la distance n'est pas de 25 km, mais de bien plus. Ce serait alors une grossière erreur du journaliste, qui écrit 25 là où c'est 50. Impossible également au vu de l'article, d'imaginer plus d'un trajet domicile-travail dans la journée. Dernière possibilité, on a oublié l'amortissement du véhicule, l'assurance, le parking, les contraventions, le contrôle technique...mais non puisqu'il est bien écrit que la dépense n'est qu'une dépense de carburant : "ce qui l'oblige à dépenser 200 euros d'essence." So what ? devrais-je dire en cette journée anglaise. Je pense que la caissière dépense bien 200 euros d'essence chaque mois, mais que le trajet domicile-travail ne lui coûte que la moitié de cette somme. Qu'on ne se méprenne pas non plus sur ce billet d'humeur. Mais quand le tableau est déjà bien sombre, je n'aime pas découvrir que l'on a rajouté une couche de noir par-dessus...

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