Sans doute avez-vous passer cette polémique autour du nombre d’élèves absents dans certaines écoles. Elle montre surtout la puissance de ce qu’on appelle maintenant la « data », ce que je vais tenter d’expliquer hors de toute polémique justement. Dans le domaine de l’éducation nationale, qu’est-ce qui peut être qualifié de donnée publique ? Chacun en conviendra il est normal et naturel de savoir combien d’écoles maternelles existent en France, combien d’écoles primaires, de lycées et de collèges. Connaître ensuite le nombre de classes et leur niveau (CE, CM, etc) est tout aussi légitime. Cela permet de voir comment tout ceci se maille sur notre territoire. Chacun en conviendra également, savoir combien d’élèves occupent chaque classe est une donnée importante. Nombre de syndicats réclament un maximum de 25 élèves par classe, d’autres en demandent 20. Quel que soit le chiffre nous voyons bien qu’il faut partir d’un constat, constat impossible à mener à bien si on ne sait pas dire le nombre d’élèves. Ainsi entre écoles, classes et élèves nous possédons là un premier jeu de données. Ajoutons que ce jeu de données est public, il suffit de le consulter ou de le télécharger pour l’étudier. Il se nomme « Effectifs d’élèves par niveau et nombre de classes par école ». La polémique de ces derniers jours a porté sur le comptage des absents en ce qu’un tel comptage revenait à stigmatiser une catégorie d’élèves. Mais pourquoi une telle polémique ? Tout simplement parce qu’elle vient de ce qu’on a cherché à connaître « précisément » le nombre d’élèves absents lors d’un jour « précis » et pour des établissements « précis » alors qu’on ne s’en préoccupait pas le jour d’avant ni le jour d’après. Etendons la question en : Est-il pertinent de connaître « chaque jour » le nombre d’élèves absents de « chaque établissement » de France ? J’ai la faiblesse de croire que oui. Il suffit pour cela de faire un peu de « data fiction » et imaginer ajouter au jeu de données de départ trois élements supplémentaires : la date, le nombre d’élèves que contient l’établissement et le nombre d’absents dudit jour. Nous aurions par exemple pour la date du 24 mars 2023 et pour le lycée « alpha » de la commune « bêta » un effectif de 456 élèves et disons 12 absents. Ici je suis déjà au bout de ma démonstration : pour une date quelconque et un établissement scolaire quelconque le ratio absents/effectif serait une donnée quelconque, alors qu’à une certaine date et pour un certain établissement scolaire ce même ratio serait polémique. Le débat se réduit donc à faut-il mesurer ou ne pas mesurer le nombre quotidien d’élèves absents ? Défenseur de la statistique je veux répondre « oui », précisément à cause des enseignements que l’on peut tirer de ces données. Est-il vrai que nombre de parents profitent du vendredi pour déjà emmener leurs enfants en week-end ? A partir de quel moment de la fin de l’année scolaire l’absentéisme commence t-il à être important? Constate t-on une baisse du nombre d’absents à l’approche des examens ? Peut-on utiliser ces données pour observer la progression territoriale des épidémies saisonnières de gastro-entérite ou de grippe ? Vous voyez qu’un tel jeu de données apporterait bien des réponses à bien des questions.
Je précise ici qu’il n’est même pas besoin d’aller au niveau du nombre d’élèves absents par classe. Se contenter du niveau de l’établissement entier est suffisant. Après tout il est du devoir d’un chef d’établissement* de savoir chaque matin quel est son effectif et de compter le nombre d’élèves absents. Sauf que faire un tel décompte chaque jour d’école pour chaque école implique « d’aussi » le faire le jour à l’origine de la polémique.
Chercher à savoir ou ne pas vouloir savoir, telle est la question posée.
* Féminin implicite comme partout sur ce blog.
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